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Almanart : malgré la popularité de l’art contemporain en France, un certain public classique y est carrément réticent...
Jérôme Sans : la France a toujours eu du mal avec la création de son époque, de Rodin à aujourd’hui la plupart des grands artistes français ont existé grâce à la scène internationale. Car bon nombre de Français restent accrochés au passé, même à Paris, ville en plein renouveau. Le problème est parfois que la culture est vécue souvent comme un luxe, un plus.
At : des exemples ?
JS : si vous regardez les grands films d’Hollywood, les séries B américaines, vous pourrez reconnaître des tableaux d’artistes contemporains ; dans la production cinématographique et TV française, vous en voyez, mais moins... Dans les autres pays, Etats Unis, Allemagne, Italie, Japon, etc, les leaders d’opinion sont actifs dans le domaine de la création, en France un peu moins ; il est de meilleur ton d’aider la restauration... La création contemporaine a parfois du mal à trouver un écho fort ; chez les grands collectionneurs français, ce sont souvent les mêmes noms qui ressortent.
At : alors que peut-on peut faire pour séduire ce public là ?
JS : sûrement encore beaucoup de choses ; quand on a inventé avec Nicolas le Palais de Tokyo, on pensait à un lieu qui présente l’art en harmonie avec la façon de vivre contemporaine ; par exemple même maintenant les horaires de plusieurs musées sont obsolètes (ndlr en 2008 : c’est encore le cas de TOUS les musées de la Ville de Paris..., le Palais de Tokyo ouvre de 12h à minuit) : comment le public peut-il visiter des expositions entre 10 et 18h, avec quelle prétention peut on imaginer attirer le public en fermant les portes quand il devient libre ?
Imaginez les salles de théâtre, concerts, cinéma avec ces horaires : pourquoi un certain monde de l’art (ndlr : essentiellement public) continue-t-il encore de se mettre à part ? Les gens doivent y venir comme dans une maison, et aussi avoir des informations sur place.
At : ce rôle pédagogique est-il si fondamental ?
JS : oui, et les gens qui s’occupent d’art ont forcément un rôle pédagogique, qui ne peut exister que si l’équipe d’une institution en a les outils ; c’était notre cas : au Palais de Tokyo le public a les mêmes informations que les journalistes, dès l’invitation aux inaugurations qui n’est pas qu’un simple carton avec une image et un nom. Ce respect des gens nous a permis de rencontrer un très large public qui se sent bien, accueilli quel que soit son niveau de connaissance ; c’est souvent un nouveau public, qui pour la plupart ne fréquentait pas d’autre institution et d’autre lieu culturel, qui a trouvé ici les ressources qu’il cherchait
(ndlr : ces principes d’ouverture sont toujours respectés sous la direction de Marc-Olivier-Wahler depuis début 2007).
At : que peut-on imaginer pour séduire les gens cultivés réticents à l’art contemporain ?
JS : les discussions, les dialogues, sont utiles, mais on ne peut pas forcer les gens ; s’il y a différentes approches, il faut noterque les mots de l’artiste sont importants : ce n’est pas des modes d’emploi, mais il n’y a pas d’art sans concept, sans idée.
At : on nous a souvent parlé d’une mauvaise collaboration entre galeries et institutions publiques, qu’en pensez vous ?
JS : je ne partage pas cet avis car nous, nous avons travaillé avec diverses organismes et galeries, françaises comme étrangères ; nous avons collaboré énormément avec l’ensemble des protagonistes qui sont autour des artistes.
At : merci de ce point de vue perturbant !
Interview réalisée en 2007 par Alessandra Quaglia, remis à jour en 2008
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